LA 7eme, e FONCTION DU LANGAGE, MES Sylvain Maurice, d’après le roman de Laurent BINET, CDN de Sartrouville

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Un polar insolent et déjanté

Autant dire tout de suite que le roman de Laurent Binet est un bonheur de loufoquerie érudite, une farce jouissive autant qu’un rocambolesque thriller. Tout commence le jour où Roland Barthes est écrasé par une camionnette au sortir d’un déjeuner avec François Mitterand, qui sera bientôt candidat aux présidentielles de 1981. Cette mort est suspecte et le commissaire Bayard est chargé d’enquêter. Le brave homme n’y entend malheureusement rien en sciences du langage et se fait donc aider par Simon, un jeune sémiologue déniché à l’université de Vincennes. Ils découvriront vite que Barthes était dépositaire d’une septième et inédite fonction du langage, découverte par Jacobson. Une fonction performative qui donnerait à son possesseur le pouvoir suprême des mots. L’enquête les mènera au travers moult péripéties sur les traces de tueurs prêts à tout pour s’approprier cette fonction et l’on y croisera une flopée d’intellectuels de l’époque, de Umberto Eco à Philippe Sollers, en passant par Julia Kristeva, BHL, Jacques Derrida, ou Michel Foucault, entre autres. C’est parfois très méchant, toujours drôlissime, certains sont ridiculisés, beaucoup sont caricaturés, mais le tout entraine le lecteur dans une sorte d’hystérie jubilatoire dans les bas-fonds des Logos Club où la joute oratoire et ses défis sont devenus les loisirs les plus hype, les plus secrets, les plus recherchés, et tant pis si le prix à payer pour ceux qui perdent est parfois très élevé. Vraiment très élevé.

Adaptation nerveuse et musicale

Sylvain Maurice a remporté les droits du roman : on retrouve la patte mauricienne que l’on avait déjà apprécié dans son Peer Gynt version jeunesse ou dans Réparer les vivants : seulement trois comédiens se partagent les nombreux personnages du roman et deux musiciens les accompagnent. Les trois comédiens s’en donnent à cœur joie et passent d’un personnage à l’autre avec une énergie sans pareille, à commencer par l’épatant Manuel Vallade (Simon), la délicieuse Constance Larrieu, qui se métamorphose en un regard ou Pascal Martin-Granel, impayable flic bourru dépassé par les événements qui ne comprend rien mais alors strictement rien à ces histoires de sémiologie. Les deux musiciens installés à cour et jardin soulignent et rythment le récit en y ajoutant encore plus de nervosité et de pêche. Tous évoluent sans décor si ce n’est de très astucieux panneaux lumineux coulissants où sont projetés des vidéos et images : pertinent, très visuel, percutant.

Gourmandise intellectuelle et insolente

Le tout forme un récit haletant, une épopée sacrément rythmée qui embarque le spectateur dans une enquête très, très rock ‘n roll où les mots sont rois. Si Sylvain Maurice a dû couper, sacrifier des personnages (on n’y verra pas BHL venu incognito grâce à sa chemise noire, ni les tueurs japonais par exemple), si la sémiologie n’y est pas aussi détaillée que dans le roman, il a gardé la cadence endiablée et la nervosité de ce polar hors normes et on passe là une fichue bonne soirée avec ces personnages hauts en couleurs, cette histoire déjantée, souvent irrévérencieuse mais toujours hilarante. Forcément, on adore.

 

La 7ème fonction du langage, d’après le roman de Laurent Binet

Adaptation et mise en scène de Sylvain Maurice

Avec Constance Larrieu, Pascal Martin-Granel, Manuel Vallade, accompagnés de Sébastien Lété et Manuel Peskine et la participation de Jack Lang.

Musique Manuel Peskine

Scénographie et lumières Eric Soyer

Video : Renaud Rubiano

CDN de Sartrouville, jusqu’au 25 novembre 2017

Réservations au : 01 30 86 77 79

 

 

 

 

 

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