TRISTESSES- Anne-Cécile Vandalem – Théâtre de l’Odéon

 

 

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Satire et dystopie politique à l’Odéon

Tristesses est une île aussi triste que son nom : après la fermeture des abattoirs qui étaient l’unique entité économique de l’ile, les habitants sont peu à peu partis sur le continent… ou décédés. Il n’en reste que 8 quand Tristesses démarre, ou plutôt 7 car Ida vient de se pendre. Sa fille Martha, femme politique à la tête d’un parti d’extrême droite, revient pour les obsèques, suscitant bien des interrogations sur le suicide de sa mère et ses véritables intentions.

Très étonnant, ce Tristesses qui oscille entre polar, dystopie et fable politique. Étonnant par sa scénographie et son dispositif : dans une atmosphère froide et bleutée comme la nuit danoise, quelques maisonnettes, fermées comme dans un village à l’abandon. Une grande partie des scènes aura lieu à l’intérieur et le spectateur ne verra le contenu que sur le grand écran situé au-dessus de la scène. Si la sensation d’enfermement, d’isolement des habitants de Tristesses est de fait encore plus palpable, le procédé peut laisser le spectateur sur sa faim (plusieurs scènes durent près de 20 minutes). Étonnant, inhabituel et déstabilisant notamment dans la première partie. Mais peu à peu la pièce prend de l’épaisseur, le discours nationaliste et identitaire de Martha se fait de plus en plus limpide et l’intention d’Anne-Cécile Vandelem apparaît clairement. Alors que jusqu’à présent on s’interrogeait sur la finalité de cette gentille fable, on devine alors ce que cette pièce-signal d’alarme vient dénoncer : la manipulation des masses, l’asservissement par l’appauvrissement, l’isolement culturel et social ou l’utilisation de la jeunesse comme arme de propagande massive.

Étonnant, donc, et si l’écriture très cinématographique peut agacer par moment, on se laisse au final saisir par l’acuité politique de Tristesses, servie de surcroît par des comédiens tous excellents et une scénographie qui souvent rappelle certains tableaux de Hopper. Qu’en reste-t-il ? Au-delà de la fable satirique présentée à l’Odéon, la très vive et très intense conviction que c’est aussi, encore et toujours pour ça que le théâtre existe : témoigner, convaincre, plaider, alerter. Anne-Cécile Vandalem fait de Tristesses un plaidoyer aussi étrange que percutant, aussi étonnant que glaçant.

Tristesses, d’Anne-Cécile Vandalem

Avec Vincent Cahay, Anne-Pascale Clairembourg, Epona Guillaume, Séléné Guillaume en alternance avec Asia Amans, Pierre Kissling, Vincent Lécuyer, Catherine Mestoussis en alternance avec Zoé Kovacs, Jean-Benoit Ugeux, Anne-Cécile Vandalem en alternance avec Florence Janas, Françoise Vanhecke, et Alexandre Von Sivers.

composition musicale Vincent Cahay, Pierre Kissling scénographie Ruimtevaarders création sonore Jean-Pierre Urbano création lumière Enrico Bagnoli création costumes Laurence Hermant création vidéo Arié van Egmond, Federico D’Ambrosio

 

Théâtre de l’Odéon jusqu’au 27 mai

Réservations au 01 44 85 40 40

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