APRES LA REPETITION – Ingmar Bergman – TG Stan – Théâtre de la Bastille

Grâce cristalline

« Au théâtre, une représentation est évidente si ces trois éléments sont présents : la parole, le comédien, le spectateur. On a besoin de ça et c’est tout, on n’a besoin de rien d’autre pour que le miracle se produise ». Le miracle se produira tous les soirs au théâtre de la Bastille : cette phrase, c’est le metteur en scène Henri Vogler qui la prononce, dans une adaptation du film éponyme d’Ingmar Bergman. Sous l’égide du TG Stan Frank Vercruyssen et Georgia Scaliett s’emparent de ce huis clos amical-amoureux entre un metteur en scène et sa comédienne. Anna a 23 ans, un talent déjà avéré et la provocation insolente. Il est metteur en scène reconnu et admiré, pourrait être son père et a follement aimé Raquel, la mère d’Anna, qu’il dirigeait il y a plus de 20 ans. Elle va jouer dans sa prochaine pièce, Le songe, et reprend là le rôle que Raquel, a interprété, jadis. Ils échangent, parlent, devisent : théâtre, direction, jeu… Et puis subitement Anna se transforme en Raquel et transporte la scène 23 ans en arrière. L’actrice arrive en répétition, ivre, provocante, narquoise, sensuelle…. Et puis nous reviendrons dans le présent-futur, cet après où Henri et Anna continuent de deviser, jouant à ce couple qu’ils ne sont pas, qu’ils pourraient être, à moins qu’ils ne l’aient toujours été…

Évidence et authenticité

Que dire sur Après la répétition si ce n’est que, comme Ingmar Bergman le dit, on n’a besoin de rien d’autre que la parole, le comédien et le spectateur pour que le miracle se produise ? Un miracle qui se produit, encore, par la seule grâce de ses comédiens, miraculeux de naturel, miraculeux de simplicité, miraculeux de spontanéité. Frank Vercruyssen dit que, avec le TG Stan, seul un travail à la table est réalisé et qu’ensuite les comédiens se lancent, sans filet, dans un jeu dépouillé au seul service du texte. C’est là que le miracle se produit : avec une grâce innée et sans artifice, avec une fluidité à la fois légère et grave, ils offrent aux spectateurs un spectacle d’une magnifique intensité. Georgia Scalliett est bouleversante : troublée et troublante, fragile et ardente, la sociétaire du Français propose ici un jeu confondant de naturel, dénué de tout artifice et riche de l’essentiel. Frank Vercruyssen, solide, fiable, rassurant, est, lui, le roc, la solidité, le Pygmalion à la fois rassurant et fasciné. Tous deux semblent jouer sur un fil ténu mais solide, tous donnent l’impression d’être, d’être seulement Henri et Anna, Henri et Raquel, Henri et Anna. Ils dégagent une évidence, une authenticité qui semblent, paradoxalement, absolues et fragiles à la fois.  Fragiles comme ces trois personnages ambigus et troublants, absolues comme cet engagement et ce don dont ils font preuve.

Cette représentation sans répétition dégage une évidence pure et une pureté évidente : celle d’avoir assisté, pendant une heure quinze, à un moment de grâce cristalline.

Après la répétition, d’après Ingmar Bergman

De et avec Georgia Scaliett, Frank Vercruyssen, TG Stan
Festival d’Automne à Paris

Théâtre de la Bastille, jusqu’au 14 novembre

Réservations au 01 43 57 42 14

 

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